105 promesses, 13 réalisations – Le bilan du second septennat d’Ali Bongo Ondimba (2016 – 2023)

ActeursMays Mouissi Consulting & Global Media Time
ExpertiseEtude socio-économique
Date de publicationJuin 2023
AuteursMays Mouissi & Harold Leckat
ScopeGabon

Résumé exécutif

 

Par Mays Mouissi & Harold Leckat

 

Résumé exécutif du rapport « 105 promesses, 13 réalisations – Le bilan du second septennat d’Ali Bongo Ondimba (2016-2023) »

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Le 29 février 2016, Ali Bongo Ondimba, Président de la République gabonaise, au pouvoir depuis octobre 2009, prononçait sa déclaration de candidature à un nouveau mandat dans la ville de Port-Gentil. Il déclina à cette occasion sa vision et son ambition pour le Gabon pour le septennat 2016 – 2023. Il déclara :

« Je suis candidat à un nouveau mandat, pour garantir à notre jeunesse un avenir meilleur en lui permettant de recevoir une éducation et une formation adaptées aux besoins de notre développement. Je suis candidat pour donner plus d’emplois décents aux jeunes. Je suis candidat pour protéger davantage la femme gabonaise et accroitre son autonomisation. Je suis candidat pour que la retraite ne soit plus considérée et vécue comme une fin de vie.

Je suis candidat pour briser le cercle de l’inutilité, pour lutter avec détermination contre les privilèges indus et bâtir un meilleur vivre ensemble fondé sur l’inclusion, la méritocratie et la solidarité. Je suis candidat pour refonder en profondeur la société gabonaise.

Je suis candidat pour poursuivre la mutation de notre économie, pour passer d’une économie de rente à une économie de production diversifiée. Je suis candidat pour poursuivre le déploiement de la CNAMGS afin d’assurer un meilleur accès aux soins de qualité sur l’ensemble du territoire. Je suis candidat pour garantir la paix et le rayonnement de notre pays. Je suis candidat en un mot pour le Gabon qui gagne ».

Au moment où s’achève le second mandat d’Ali Bongo Ondimba et qu’il envisage d’en solliciter un autre, quel bilan peut-on tirer de son action ? Quel est le niveau de réalisation des engagements contenus dans le programme pour lequel il sollicita le suffrage des Gabonais en août 2016 ?

Depuis l’accession du Gabon à l’indépendance en 1960, jamais des citoyens, en dehors du cadre des partis politiques, n’avaient pris l’initiative de produire par eux-mêmes un bilan exhaustif et documenté de la mise en œuvre des engagements contenus dans le programme présidentiel d’un Chef d’État. Cet exercice, essentiel pour permettre aux Gabonais d’avoir une meilleure lisibilité de l’action publique, a conclu à des constats sans équivoque sur les résultats de l’action d’Ali Bongo Ondimba en qualité de Président de la République d’une part et sur la capacité des gouvernements successifs qu’il a mis en place à traduire en actes ses engagements programmatiques d’autre part.

Cependant, pour être complètement objectif, ce bilan ne doit pas occulter les événements endogènes et exogènes qui ont pu perturber la mise en œuvre effective de certains engagements programmatiques. Sans qu’elle soit exhaustive, la liste d’événements ci-dessous a pu avoir un impact sur la mise en œuvre de certains engagements.

Événements exogènes :

  • la survenance de la pandémie du covid-19 en 2020 ;
  • la forte réduction des échanges internationaux et des mouvements de personnes entre 2020 et 2022 en raison des confinements exceptionnels décidés à travers le monde ;
  • le déclenchement de la guerre en Ukraine en février 2022 et son impact sur le cours des matières premières énergétiques et alimentaires.

Événements endogènes :

  • la crise post-électorale de 2016 née de l’élection contestée du candidat Ali Bongo Ondimba ;
  • l’accident vasculaire cérébral du Président Ali Bongo Ondimba d’octobre 2018 survenu au cours d’un déplacement officiel à Riyad (Arabie saoudite) ;
  • l’instabilité gouvernementale consécutive à l’AVC du président (4 Premiers ministres et une dizaine de remaniements ministériels en 7 ans) ;
  • la tentative de coup d’État de janvier 2019 initiée par un groupe d’officiers gabonais que nous choisissons de mentionner ici, même si nous considérons comme négligeable son impact sur la réalisation des promesses faites aux Gabonais par le Président Ali Bongo Ondimba en 2016.

Ayant tenu compte de ces limites, nous avons dressé le bilan décliné ci-dessous.

 

SYNTHÈSE DU BILAN

Le programme, Mon engagement pour un Gabon émergent, présenté par le candidat Ali Bongo Ondimba lors de l’élection présidentielle du 27 août 2016, contient 105 promesses réparties en 3 chapitres :

  • Priorité 1 – Paix : 34 promesses ;
  • Priorité 2 – Emploi pour tous : 46 promesses ;
  • Priorité 3 – Meilleures conditions de vie : 25 promesses.

À l’issue des sept années du second mandat d’Ali Bongo Ondimba, le niveau de réalisation de ses 105 engagements programmatiques se décline ainsi qu’il suit :

  • 59 promesses non réalisées (56%);
  • 21 promesses très partiellement réalisées (20%);
  • 11 promesses partiellement réalisées (11%);
  • 13 promesses réalisées (12%);
  • 1 promesse dont le niveau de réalisation n’a pu être évalué (1%).

Les résultats de ce bilan traduisent globalement un échec qui illustre notamment l’incapacité de l’équipe sortante à implémenter et coordonner avec efficacité la mise en œuvre du programme septennal du Président Ali Bongo Ondimba.

L’échec de l’exécutif sortant peut se résumer en sept points :

  • le retard pris dans le développement des programmes susceptibles de favoriser l’accès des populations aux principaux services de base (santé, éducation, eau et électricité) tant à Libreville qu’à l’intérieur du pays ;
  • l’incapacité à réaliser dans des délais raisonnables les engagements du Président de la République en lien avec les infrastructures notamment l’amélioration de la qualité du réseau routier national et la construction d’infrastructures énergétiques à grande capacité de production ;
  • l’impuissance des gouvernements successifs à résorber le chômage endémique qui n’a cessé de s’accroitre depuis le début du septennat, en particulier chez les jeunes ;
  • l’absence d’une politique du logement adaptée, cohérente et efficace susceptible de réduire le déficit chronique en logements décents d’une part et de sécuriser la propriété foncière des Gabonais d’autre part ;
  • l’incapacité à mettre en place un environnement des affaires de qualité propre à favoriser la création, le développement et la croissance de champions nationaux et l’attrait d’une masse critique d’investissements directs étrangers ayant un impact structurant sur l’emploi et sur les recettes fiscales ;
  • la faible diversification de l’économie nationale toujours dépendante du pétrole et par conséquent la faible diversification sectorielle des sources de revenus de l’État ;
  • une redistribution des ressources publiques inéquitable qui favorise la hausse des inégalités et de la pauvreté.

À l’inverse, l’équipe sortante semble avoir été plus confortable dans la réalisation des promesses qui reposaient uniquement sur l’adoption de textes (5 des 13 promesses intégralement réalisées sont de natures législatives ou réglementaires). Des succès ont également été enregistrés dans le domaine portuaire (3 des 13 promesses intégralement réalisées). Enfin, à Libreville, dans le domaine de l’éducation, le Président Ali Bongo Ondimba a à son actif la construction de plusieurs établissements primaires et secondaires réalisés avec concours de l’Agence française de développement (AFD) dans le cadre du programme PISE.

Le programme Mon engagement pour un Gabon émergent ayant décliné les promesses par priorité, nous dressons ci-dessous le bilan de chaque groupe de priorité.

Priorité 1 – Paix : 34 promesses

Priorité 1 – Paix

Statut Promesses %
Non réalisé 13 38%
Très partiellement réalisé 9 26%
Partiellement réalisé 5 15%
Réalisé 6 18%
Non évaluable 1 3%
Total 34 100%

Ce chapitre est celui où le Président sortant compte le plus de réalisations. Sur les 34 promesses qu’il contient, seules 6 (18%) ont été intégralement réalisées au cours du septennat qui s’achève. Il s’agit des promesses énumérées ci-dessous :

  • œuvrer pour que le Gabon demeure une terre de tolérance (promesse 1);
  • créer une commission pour la régulation des ressources naturelles et l’affectation du territoire (promesse 19) ;
  • protéger 23% des eaux territoriales gabonaises (promesse 25) ;
  • renforcer le dispositif juridique de protection des droits des femmes (promesse 29) ;
  • réserver 30% des postes administratifs aux femmes (promesse 30) ;
  • adopter une loi conditionnant la recevabilité d’une liste de candidature aux élections locales à une composition paritaire d’une part et à la présence de 30% de jeunes de moins 40 ans d’autre part (promesse 32).

En revanche, 13 promesses (38%) de ce chapitre n’ont pas été réalisées dont les plus emblématiques sont :

  • 25 000 jeunes engagés dans le service civique (promesse 2) ;
  • créer quatre (4) établissements régionaux dédiés au sport et une académie nationale de sport-étude pluridisciplinaire (promesse 4) ;
  • favoriser un climat social apaisé et ainsi parvenir à une réduction drastique du nombre de grèves (promesse 9) ;
  • construire à la Cité de la démocratie 110 000 m² de bureaux pour regrouper les administrations centrales (promesse 11) ;
  • 100% des demandes de documents administratifs traitées et suivies en ligne (promesse 12) ;
  • nominations aux postes de responsabilité de l’administration effectuée au terme d’un appel public à candidature sur des critères de sélection rigoureux et documentés (promesse 28).

Enfin, dans ce chapitre, neuf (9) promesses (26%) ne sont que très partiellement réalisées, cinq (5) promesses partiellement réalisées (15%) et une promesse n’a pu être évaluée (3%).

Priorité 2 – Emploi pour tous : 46 promesses

Priorité 2 – Emploi pour tous
Statut Promesses %
Non réalisé 33 71%
Très partiellement réalisé 4 9%
Partiellement réalisé 4 9%
Réalisé 5 11%
Total 46 100%

Seulement 5 (11%) des 46 promesses de ce chapitre ont été intégralement réalisées. Il s’agit des promesses suivantes :

  • construire neuf (9) collèges et huit (8) écoles primaires publiques (promesse 64) ;
  • baisser le taux de redoublement, améliorer les connaissances acquises et le taux de réussite aux examens (promesse 68) ;
  • construire un port commercial et un port minéralier en extension des infrastructures existantes du port d’Owendo (promesse 77) ;
  • Ajouter 13 millions de tonnes/an de capacité supplémentaires à Owendo (promesse 78) ;
  • construire un terminal de pêche à Owendo (promesse 79).

En revanche, 33 promesses (71%) de ce chapitre issu du programme présenté par le candidat Ali Bongo Ondimba en 2016 n’ont pas été réalisées. Ses gouvernements successifs ont notamment échoué à :

  • faire du Gabon un des 10 pays africains les plus réformateurs (promesse 35) ;
  • créer l’Office national des recettes (ONR) et augmenter les recettes hors pétrole (promesse 39) ;
  • créer 5000 emplois dans la ZERP de l’Île Mandji par l’installation et l’entrée en production de premières unités de production pétrochimique (promesse 45) ;
  • créer une Cité Numérique du Savoir dans l’agglomération à Bikélé destinée à accueillir le nouveau campus de l’Institut Africain d’Informatique (IAI) – (promesse 49) ;
  • démarrer la valorisation du site minier de Mabounié (promesse 54) ;
  • construire 700 crèches (promesse 65) ;
  • conduire la transition de 20 000 emplois du secteur informel vers le secteur formel (promesse 62) ;
  • construire un centre de rééducation des jeunes délinquants (promesse 69) ;
  • prendre en charge 100% des mineurs condamnés dans le centre de rééducation de l’armée.

Sur les huit (8) autres promesses de ce chapitre, quatre (4) soit 9% ont été très partiellement réalisées et les quatre (4) autres (9% également) l’ont été partiellement.

Priorité 3 – Meilleures conditions de vie : 25 promesses

Priorité 3 – Meilleures conditions de vie
Statut Promesses %
Non réalisé 13 52%
Très partiellement réalisé 8 32%
Partiellement réalisé 2 8%
Réalisé 2 8%
Total 25 100%

Ce chapitre est celui où l’on compte le moins de réalisations. À peine deux (2) promesses sur 25 sont à porter à l’actif du Président sortant (8%). Il s’agit de :

  • réaliser des emprunts dans la sous-région dont le produit était destiné aux indemnisations foncières des populations déplacées dans le cadre des différents travaux de réaménagement de Libreville et de Port-Gentil, dont les travaux d’assainissement (promesse 94) ;
  • réhabiliter l’hôpital de Melen (promesse 104).

13 promesses (52%) n’ont pas été réalisées dont les plus emblématiques sont :

  • 44 kilomètres de 2×2 voies reliant le nord et le sud de Libreville à la RN1, au niveau du PK15 (promesse 84) ;
  • 100 000 personnes supplémentaires ayant un accès direct à l’eau courante (promesse 88) ;
  • porter la capacité de production nationale d’électricité de 611 MW en 2016 à 1400 MW en 2023 (promesse 89) ;
  • construction de 5 barrages hydroélectriques (promesse 90) ;
  • démarrage de travaux du barrage de Booué (400 MW) après l’évaluation technique et financière (promesse 91) ;
  • traiter 100% des déchets solides et liquides collectés à Libreville et Port-Gentil (promesse 95) ;
  • attirer des investisseurs chinois, prêts à préfinancer le projet de la Baie des Rois, dont ils assureront par la suite la vente des parcelles aménagées à des promoteurs d’une part et construction d’un centre de conférence à la cité de la démocratie, pour soutenir le développement du tourisme d’affaires, et d’événementiel d’autre part (promesse 96) ;
  • délivrer une masse critique de 50 000 titres fonciers (promesse 97) ;
  • livrer 6 zones d’aménagement concerté qui reconfigurent l’urbanisation des agglomérations de Libreville et Port-Gentil, et mettent sur le marché une masse critique de logements (promesse 98) ;
  • financer le panier minimum vieillesse (promesse 100).

Enfin, 8 promesses (32%) de ce chapitre ont été très partiellement réalisées tandis que 2 autres (8%) ont été partiellement réalisées.